Un concept basé sur le partage
Une grainothèque, c’est un petit meuble rempli de graines mises à disposition de tous. Les semences sont rangées par paquet dans des petits sachets et classées par catégorie ou ordre alphabétique. Chacun est libre de se servir librement, et s’il le peut, dépose à son tour des graines afin de créer une boucle de partage.
Une grainothèque peut s’installer dans un lieu public (bibliothèque, mairie…) ou privé (commerce de proximité, bar…). L’important est que ce lieu soit accessible à tous et fréquenté régulièrement par les habitants.
Une mise en œuvre collective
J’ai découvert ce concept en passant par la bibliothèque d’un petit village de ma région, et j’ai tout de suite adoré le principe. Étant moi-même adepte du potager, je trouvais fabuleux de pouvoir trouver de nouvelles variétés à tester chez moi, sachant que ces semences avaient poussé localement et donc étaient adaptées à mon climat. En outre, avec quelques amis nous venions de créer un collectif (les GarnemAnts) pour la transition de notre territoire : l’installation d’une grainothèque était une première action simple et efficace à mettre en œuvre avec les bénévoles.
Renseignements pris, j’ai contacté Mélanie qui avait mis en place cette grainothèque de village afin de pouvoir reproduire le modèle dans ma commune de 5000 âmes. Mélanie était elle-même grande productrice de légumes au sein du potager familial, et ne savait plus que faire de ses récoltes de graines, souvent excessives pour une auto-production. D’où son idée de les partager. Il s’est avéré qu’elle en avait suffisamment à nous donner pour démarrer notre propre grainothèque, ce qui nous a incroyablement aidé au lancement du projet, et encore maintenant après une année d’installation.
Une mise en œuvre collective
Ni une ni deux, me voilà partie à la recherche d’un meuble pour accueillir ces graines. Une voisine nous a donné une commode qui était destinée à la déchèterie. Le relooking de meubles faisant partie de mes compétences professionnelles, j’ai pu redonner vie à cette vieille commode en lui ajoutant un décor légumier. L’aspect du meuble est en effet essentiel pour capter l’attention du chaland. Nous avons également ajouté des cases dans les tiroirs afin de simplifier le rangement des sachets.
Il a ensuite fallu trouver un lieu d’accueil. Le petit supermarché de notre village a répondu très favorablement à notre demande, et nous a mis à disposition une partie de son hall d’entrée. Une aubaine !
Enfin, dernière mission d’importance : créer une signalétique autour de la grainothèque afin que le public puisse l’identifier comme telle, en comprenne le fonctionnement, et ose se servir et y déposer des semences. Par chance, Antoine, bénévole du collectif et infographiste de métier, a pu nous fournir de beaux supports visuels.
Un suivi régulier pour maintenir la dynamique
En tant que référente du projet, la grainothèque me demande un suivi régulier. Il faut en effet veiller au réapprovisionnement des sachets de graines au rythme des saisons et à l’entretien du meuble grâce à un passage hebdomadaire.
Il s’agit également d’assurer une petite logistique : récupérer des graines chez Mélanie 1 à 2 fois par an, récolter des feuilles de brouillon pour constituer les sachets, organiser des ateliers collectifs d’ensachage de graines, assurer une permanence de temps en temps afin de sensibiliser de nouveaux publics.
De belles rencontres pour plus de résilience alimentaire
Dès l’installation de la grainothèque, le succès a été au rendez-vous. En effet, les vertus d’une grainothèque sont nombreuses. La base est évidemment le partage, mais elle permet également de rencontrer des habitants de son village ou de son quartier que l’on n’aurait jamais croisé ailleurs. D’autre part, le fait de troquer les graines, sans intervention de monnaie, permet de diffuser certaines semences paysannes qui sont interdites à la vente, et donc de lutter contre l’appauvrissement du vivant. Et puis surtout, la grainothèque permet de développer la résilience alimentaire des habitants en leur offrant la possibilité de produire leur nourriture localement et à moindre coût.
Quelques mois après le lancement, la plupart des habitants de notre commune connaissent la grainothèque et commencent à y déposer leurs récoltes de graines. C’est une véritable satisfaction de constater que le projet commence à vivre de lui-même : le cercle vertueux est amorcé pour la résilience du territoire.