Proche du point de non-retour
L’année dernière l’opinion publique s’est émue de la forêt amazonienne en feu et cette année, bien que la situation soit au-moins aussi catastrophique, la presse ne parle quasiment plus de la forêt qui part en fumée. Pourtant, la déforestation continue de s’accélérer au Brésil, où 20 % de la forêt aurait déjà été détruite. Le climatologue Carlos Nobre estime même que l’Amazonie risque de se transformer en savane d’ici 15 ans si rien n’est fait pour inverser la tendance actuelle.
Si vous ne le savez pas, les forêts tropicales sont importantes à bien des égards. En effet, elle régulent les régimes pluviométriques mondiaux, captent et stockent le carbone présent dans l’atmosphère, permettent à plus d’un milliard de personnes de satisfaire leurs besoins primaires en matière d’alimentation, d’eau, de logement et de médicaments et protègent la majeure partie de la biodiversité terrestre restante.
Et puis des travaux de recherche montrent que la fragmentation des écosystèmes forestiers contribue à la multiplication des maladies zoonotiques comme la COVID-19 ou Ebola. La protection des forêts est donc aussi essentielle pour la santé publique mondiale.
Au niveau climatique, le GIEC estime que 11 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre proviennent de la déforestation et de la dégradation des sols, ce qui en fait l’une des premières causes des changements climatiques. Pourtant, au cours des 10 dernières années, la perte de couverture forestière tropicale a presque doublé. En 2019 seulement, 11,9 millions d’hectares de forêts tropicales ont disparu, soit la superficie du Nicaragua (ce qui équivaut à la disparition d’une surface équivalente à celle d’un terrain de football en moyenne toutes les six secondes, toute l’année).
Notre argent continue à financer des projets de déforestation
Que peut-on faire pour préserver la forêt amazonienne (et par la même occasion, toutes les forêts du monde et en particulier les forêts primaires si importantes) ? Il se trouve qu’une grande partie de la réponse se trouve dans la manière de gérer notre argent. Pourquoi ? Parce que les grandes banques mondiales, et françaises, continuent à financer les activités industrielles qui accélèrent la déforestation. Rien qu’entre 2016 et 2020, les sociétés responsables de déforestation et présentes dans un des trois bassins forestiers tropicaux ont reçu plus de 153,9 milliards de dollars de crédits.
Le rapport “Votre argent finance-t-il la destruction des forêts tropicales ou la violation des droits ?” présenté sur le site forestsandfinance.org démontre qu’entre 2013 et 2019, le secteur financier français a apporté des fonds représentant près de 2 milliards d’euros à cinq des six entreprises agro-industrielles les plus nocives impliquées directement ou indirectement dans des activités de déforestation dans les plus importantes forêts tropicales du monde. Cela fait de la France le deuxième plus gros contributeur de fonds à ces entreprises parmi toute l’UE.
Tristement, depuis l’adoption par la France de la loi historique sur le devoir de vigilance en 2017, les banques BNP Paribas, Natixis et Crédit Agricole ont toutes les trois soutenu des entreprises associées à la destruction des forêts. Dans le , Pire, BNP Paribas se trouve dans le top 10 des “financeurs” de la déforestation.
Des actions variées pour agir à tous les niveaux
L’association “All 4 Trees” a lancé l’année dernière la campagne #Act 4 Amazonia (le lien est en bas de page) pour mobiliser les citoyens autour de cet enjeu primordial.
Concrètement, nous pouvons agir à plusieurs niveaux. Premièrement, en interpellant les grandes banques sur ce sujet soit en parlant avec votre conseiller soit en écrivant un courrier pour leur demander de ne plus financer la déforestation. Pour aller plus loin, vous pouvez bien entendu changer de banque pour une alternative plus éthique et solidaire (comme le Crédit Coopératif ou la Nef) comme j’en parlais dans cet article.
Et puis nos habitudes de consommation ont aussi un rôle à jouer dans la préservation des forêts mondiales. Vous pouvez donc décider de ne plus consommer de produits qui accélèrent la déforestation, réduire votre consommation de viande, acheter des meubles et objets certifiés ou d’occasion. Bref, plus que jamais, chaque geste compte !